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La loi sur la servitude de marchepied Imprimer Envoyer
Mercredi, 04 Novembre 2009 17:34

Code Général de la propriété des personnes publiques

Version en vigueur au 17 août 2015 (nouvelles dispositions en italique)

Article L2131-2

Les propriétaires riverains d'un cours d'eau ou d'un lac domanial ne peuvent planter d'arbres ni se clore par haies ou autrement qu'à une distance de 3,25 mètres. Leurs propriétés sont grevées sur chaque rive de cette dernière servitude de 3,25 mètres, dite servitude de marchepied.

Tout propriétaire, locataire, fermier ou titulaire d'un droit réel, riverain d'un cours d'eau ou d'un lac domanial est tenu de laisser les terrains grevés de cette servitude de marchepied à l'usage du gestionnaire de ce cours d'eau ou de ce lac, des pêcheurs et des piétons.

La responsabilité civile des riverains visés au deuxième alinéa ne peut être engagée au titre des dommages causés ou subis à l'occasion du passage des pêcheurs ou des piétons qu'en raison de leurs actes fautifs.

La continuité de la servitude de passage, dite "servitude de marchepied", doit être assurée tout au long du cours d'eau ou du lac domanial ; la ligne délimitative ne peut s'écarter de celle du domaine fluvial, sauf à titre exceptionnel lorsque la présence d'un obstacle naturel ou patrimonial rend nécessaire son détournement. Dans ce cas, la ligne délimitative de la servitude est tracée au plus près de celle du domaine public fluvial, dans la propriété concernée.

Les propriétaires riverains des cours d'eau domaniaux sont tenus, dans l'intérêt du service de la navigation et partout où il existe un chemin de halage ou d'exploitation, de laisser le long des bords desdits cours d'eau domaniaux, ainsi que sur les îles où il en est besoin, un espace de 7,80 mètres de largeur. La servitude dont est ainsi grevée leur propriété est dite servitude de halage.

Ils ne peuvent planter d'arbres ni se clore par haies ou autrement qu'à une distance de 9,75 mètres sur les bords où il existe un chemin de halage ou d'exploitation.

Le long des canaux de navigation, les pêcheurs et les piétons peuvent user du chemin de halage et de la portion de berge faisant partie du domaine public, dans la mesure où le permet l'exploitation de la navigation.

Sur décision de l'autorité administrative, le droit visé à l'alinéa précédent peut exceptionnellement être supprimé soit pour des raisons d'intérêt général, soit pour des raisons de sécurité lorsque les berges sont incluses dans des établissements industriels.

Lorsqu'un cours d'eau est déjà grevé de la servitude prévue au IV de l'article L. 211-7 du code de l'environnement, cette dernière servitude est maintenue.

Une commune, un groupement de communes, un département ou un syndicat mixte concerné peut, après accord avec le propriétaire du domaine public fluvial concerné, et le cas échéant avec son gestionnaire, entretenir l'emprise de la servitude de marchepied le long des cours d'eau domaniaux.




Article L2131-4

Les propriétaires riverains qui veulent faire des constructions, plantations ou clôtures le long des cours d'eau domaniaux peuvent, au préalable, demander à l'autorité administrative compétente de reconnaître la limite de la servitude.

Si, dans les trois mois à compter de la demande, cette autorité n'a pas fixé la limite, les constructions, plantations ou clôtures faites par les riverains ne peuvent plus être supprimées que moyennant indemnité.

Une commune, un établissement public de coopération intercommunale, un département, un syndicat mixte ou une association d'usagers intéressés peuvent demander à l'autorité administrative compétente de fixer la limite des emprises de la servitude de marchepied mentionnée à l'article L. 2131-2, dans les cas où celle-ci n'est pas déjà fixée. L'autorité administrative compétente en opère la délimitation dans le délai d'une année suivant la date de la demande.

 

Commentaires :

La loi du 30 décembre 2006 (loi sur l'eau ) a étendu aux piétons le bénéfice de la servitude de marchepied établie par la loi du 28 mai 1965. Le principe de cette servitude est fort ancien puisqu'il remonte à une ordonnance royale de 1669 !

La loi ne vaut pas transfert de propriété, le propriétaire riverain est seulement tenu de ne pas faire obstacle au passage et de laisser les piétons, les pêcheurs et le service gestionnaire utilise l'emprise de la servitude. Toutefois le dernier alinéa légitime l'intervention des collectivités locales pour permettre l'entretien des terrains concernés. Il ressort des discussions parlementaires que l'accord du propriétaire n'est pas nécessaire.

Des affirmations, déclarations et correspondances récentes, montrent que, en Haute Savoie, les services de l'Etat ainsi que certains édiles ignorent manifestement cette disposition législative ! Ils font semblant en outre de ne pas savoir qu'il a toujours été possible pour les collectivités d'intervenir sur un terrain privé, moyennant quelques formalités (document d'arpentage et un acte notarié) : trou de mémoire opportun !

La modification récente de la loi introduit la notion de continuité de la servitude qui doit être assurée, donnant ainsi force de loi à la jurisprudence. elle ouvre également  la possibilité (reconnue aussi par la jurisprudence) de déplacer la servitude en cas d'obstacle, mais seulement et à titre exceptionnel, à l'intérieur de la même propriété (NB, les services de l'Etat omettent d'intégrer ce nouveau paragraphe dans l'annexe relative aux servitudes publiques des PLU) . Il est dorénavant possible de mettre en demeure l'autorité compétente de procéder à cette nouvelle délimitation dans un délais d'un an. Cela présente, en outre, l'avantage, en cas de déplacement de la rive par immersion ou effondrement, de délimiter une nouvelle emprise de la servitude, sans qu'il soit nécessaire de redélimiter le domaine public avec les manoeuvres dilatoires faciles à imaginer de la part des Préfectures attachées à défendre les riverains.

Un obstacle ne peut qu'être naturel, car un obstacle artificiel est en infraction avec la Loi et doit être supprimé à ce titre (sauf ceux qui présenteraient un intérêt patrimonial). On peut raisonnablement penser qu'un obstacle résultant d'une cause naturelle (érosion par exemple) sera considéré comme un obstacle naturel.

Délimitation

La servitude se mesure à partir de la limite des plus hautes eaux, la jurisprudence admet que l'on puisse s'écarter de cette limite pour des raisons de sécurité voir la lettre du Ministre, ceci vient d'être repris dans la Loi du 17 août 2015. Il est important de savoir que l'Assemblée Nationale a rejeté (cliquez ici) l'amendement sénatorial (inspiré par les riverains et n' aurait probablement pas déplu à certains sous Préfets) qui aurait vidé la Loi de son contenu en admettant la suppression de la servitude en cas de création d'un chemin parallèle, même éloigné  de la rive (ceci explique quelques bizarreries et irrégularités en ce qui concerne le prétendu cheminement piétonnier autour du Lac d'Annecy).

La servitude est de 3.25m, elle peut être ramenée (pour des raisons précisément énumérées) à 1.50m.

Elle peut englober des constructions existantes ou des clôtures, même antérieures à la loi de 1964 (Conseil d'Etat n° 95403). Le Ministère le confirme également : "selon toute probabilité des terrains clos sont grevés de cette servitude".

On ne peut soutenir sérieusement, de bonne foi, qu'il faille une largeur minimale de 1.50m contrevérité martelée par la Préfecture 74 et les riverains au début de l'affaire du Quai de Chavoire (voir la lettre du Ministre) .

Un effondrement de la rive devrait entraîner une nouvelle délimitation, ou un déplacement de la servitude, il est probable que  dans le cas d'un effondrement de mur (c'est très possible) situé dans l'emprise de la servitude (3.25m à compter de la rive), celui ci ne pourrait être reconstruit à l'identique, les seuls travaux autorisés sont ceux qui auraient pour objet de conforter la servitude, la nouvelle rédaction de la loi va en ce sens, la continuité devant dorénavant être assurée.

Occupation du sol admises ou interdite.

Sont interdits :

  • Tout permis de construire et toute autre autorisation d'occupation du sol  et probablement tous travaux concernant une construction existante, qui n'auraient pas pour objet "d’améliorer la conformité de l’immeuble avec la servitude de marchepied  (CAA Lyon N° 93LY00013).
  • Tout ce qui expressément interdit par l'article L2131-2 du CGPPP, y compris : "les éléments de végétation qui empêchent ou limitent l’exercice, le long du domaine public fluvial, de la servitude de marchepied" (CAA Bordeaux 20 décembre 2007).
  • Et plus généralement tout ce qui relève de la contravention de grande voirie.

Sont autorisé à contrario tout ce qui ne fait pas obstacle à la servitude ou permet de la conforter (la reconstruction d'une passerelle, ou la réparation d'un affaissement local par exemple).

Entretien

Contrairement aux cours d'eau non domaniaux, aucun texte ne prévoit à qui incombe la charge de l'entretien, la Loi (dernier alinéa), si elle ouvre une possibilité d'action aux collectivités, ne met pas pour autant l'entretien à leur charge. Si l'on fait une recherche dans les questions parlementaires, on apprend qu'une intervention publique a toujours été possible. Ceci infirme des propos tenus régulièrement et notamment dans la presse par certains représentants de l'Etat qui affirment, avec un certain culot, que ce n'est juridiquement pas possible (voir lus haut).

L'existence de la servitude n'engage pas la responsabilité des propriétaires, cela a clairement été précisé lors des discussions parlementaires.

Sauf, bien sur, en cas d'acte fautif du propriétaire, ce qui pourrait être le cas pour le Quai de Chavoire  : les obstacles ayant manifestement été établis pour empêcher le passage des piétons. Ces obstacles empêchent, en outre, l'intervention des forces de l'ordre dans le cas où (Louis de Funès n'est pas loin ) ils voudraient verbaliser les nudistes !

Obstacles antérieurs à 1965

La servitude de marchepied est fort ancienne, on retiendra seulement que dans sa forme actuelle elle remonte une loi datant de 1965 (Loi 65- 409 du 28 mai 1965) étendant le bénéfice de la servitude aux pêcheurs, puis aux piétons (loi sur l'eau du 30 décembre 2006).

Les interdiction de réaliser des clôtures remontent donc, au moins,  à 1985, c'est à dire que tout ce qui a été fait depuis est illégal. Les clôtures antérieurs ne sont certes pas illégales, mais doivent être supprimées. C'est ce qu'à indiqué lé ministère de l’Équipement dans une lettre du 31 juillet 2009 au Préfet de la Haute Savoie et qui a été confirmé depuis par le TA de Nantes :

« Considérant que la circonstance que la clôture en cause aurait été réalisée depuis des « temps immémoriaux » sans avoir fait l’objet d’aucune modification ou remplacement, n’est pas de nature à être utilement invoquée pour contester  l’existence d’une contravention de grande voirie qui est une infraction continue dont la prescription ne commence à courir qu’à compter du  premier acte de poursuite (TA Nantes N°1307162 16/01/2014) »

Les références relatives à l'application du droit Sarde, à supposer qu'elles existent réellement, sont inopérantes. La Loi promulguée en 1965 par le Général De Gaulle s'appliquant à l'ensemble du territoire de la République .

Malheureusement les services Préfectoraux n'ont jusqu'ici mis que peu d'enthousiasme à poursuivre les contrevenants !

Précision utile :

La loi s'applique sans restriction sur toutes les rives d'un lac domanial (ce qui est le cas à Annecy), sans considération de proximité de bâtiments d'habitation et sans possibilité de réduire ou suspendre la servitude, à la différence du littoral maritime où de telles possibilités existent (art L121-31 à 33) du code de l'urbanisme), mais dans le stricte mesure des objectifs fixés par la Loi (CE 31 mars 1989 Épx Guyon).

 

Constitutionalité de la Loi.

Saisi  du problème de la constitutionalité de la loi sur la servitude de marchepied, dans l’affaire des rives de l’Erdre , le conseil d’Etat a jugé «  qu’il a pas lieu de transmettre au Conseil constitutionnel la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution des articles L. 2131-2 et L. 2131-5 du code général de la propriété des personnes publiques. ». N° 382605 3 novembre 2014.

Pour les motifs suivants :

« Considérant qu'à supposer que le moyen tiré de ce que le législateur aurait dû prévoir un droit de délaissement soit nouveau et porte sur une question qui n'a pas été soumise à la cour, la servitude instituée par les deux premiers alinéas de l'article L. 2131-2 du code général de la propriété des personnes publiques dont il n'est pas contesté qu'elle répond à un but d'intérêt général en permettant l'exercice de la pêche et de la promenade limite seulement l'exercice du droit de propriété sur une bande de 3,25 mètres ; que l'article L. 2131-3 du code prévoit que lorsque l'exercice de la pêche, le passage des piétons et les nécessités d'entretien et de surveillance du cours d'eau ou du lac le permettent, cette distance peut être exceptionnellement réduite jusqu'à 1,50 mètre sur décision de l'autorité gestionnaire ; que l'article L. 2131-4 du même code dispose que les propriétaires riverains qui veulent faire des constructions, plantations ou clôtures le long des cours d'eau domaniaux peuvent demander à l'autorité compétente de reconnaître la limite de la servitude et si, dans les trois mois à compter de la demande, cette autorité n'a pas fixé la limite, les constructions, plantations ou clôtures faites par les riverains ne peuvent plus être supprimées que moyennement indemnité ; que le dernier alinéa de l'article L. 2131-2 du code précise que les collectivités territoriales peuvent, après accord avec le propriétaire du domaine public fluvial concerné ou son gestionnaire, entretenir l'emprise de la servitude de marchepied le long des cours d'eau domaniaux ; qu'eu égard à l'ensemble de ces dispositions, et alors même que le législateur n'a pas prévu de droit de délaissement, l'article L. 2131-2 est proportionné aux buts poursuivis et assorti de garanties suffisantes au regard du respect du droit de propriété tel qu'il est garanti par l'article 2 de la Déclaration ; que, par suite, la question, qui n'est pas nouvelle, ne présente pas un caractère sérieux » ;





Mise à jour le Samedi, 22 Juillet 2017 10:43